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Economie / Le 4e rapport de l’Observatoire national de la formation des prix et des marges indique une baisse des prix sur l’ensemble de la chaîne, en particulier pour les prix à la production (- 5 %). Avec des prix qui restent stables voire diminuent légèrement, seul le consommateur tire parti de ce contexte difficile, ce qui devrait peut-être pousser à s’interroger davantage sur le juste prix des produits.

Si la hausse globale des prix agricoles s’était poursuivie en 2013, l’année 2014 est marquée par une baisse de 5 % pour les prix à la production. Un repli qui s’observe également pour les prix des produits des industries alimentaires (- 2 %) et pour les prix à la consommation qui accusent une diminution de – 0,7 %, indique le 4e rapport de l’Observatoire national de la formation des prix et des marges, présenté par le président de l’Observatoire Philippe Chalmin le 21 avril au ministère de l’Agriculture. Au niveau de la production, toutes les filières sont concernées à l’exception du blé dur, avec des baisses encore plus marquées pour les bovins (- 6 %) et les porcins (- 8 %). Proportionnellement, le recul des prix à la production n’est pas répercuté sur les prix à la consommation. Si l’on prend l’exemple du jambon cuit, le prix payé par le consommateur n’a varié que de 10,82 € / kg à 11,05 €/kg entre 2011 et 2014, malgré les fluctuations du coût d’achat entrée abattoir, supportées par la première transformation et par la distribution qui ont réduit leur marge brute. Cependant, pour des produits comme la longe de porc ou le poulet, le rapport note que le mouvement général de baisse des prix de détail est concomitant de celui des prix à la production, mais dans une proportion moindre. « Ces évolutions différentes et parfois divergentes des prix amont et des prix aval ont eu pour effet une amélioration des marges brutes dans l’industrie et / ou dans la grande distribution », souligne ainsi la synthèse des travaux, ce qui explique une partie des tensions au sein de la filière.

Les producteurs sous pression

Le secteur de l’élevage est le plus impacté par les baisses de prix à la production, non compensées par la baisse des prix de l’alimentation animale. Ainsi, le prix du porc et le coût de production s’équilibrent à peine en 2014, tandis que le coût de production de la viande bovine est supérieur au prix de vente. Pour la filière laitière, les prix à la production ont été tirés vers le haut à l’été 2014, consécutivement à la sécheresse en Océanie, mais il faut s’attendre à une dégradation. Face à ce constat, les organisations du monde agricole n’ont pas tardé à réagir. Le rapport « confirme que les coûts de production des agriculteurs, lorsqu’on y inclut la rémunération de la main d’œuvre familiale, ne sont pas couverts par les prix, ni même par les prix et les aides dans certaines filières », a regretté l’APCA, appelant à actionner « les leviers de politiques publiques qui pourraient contribuer à remédier aux déséquilibres préjudiciables aux exploitations et aux filières ». « Les paysans ont la corde au cou ! », a de son côté regretté la FNSEA, relevant les conséquences de « la guerre des prix que se livrent les enseignes », et qui « met en difficulté les fournisseurs, est destructrice d’emplois et de pouvoir d’achat ». Pour 100 € payés par le consommateur, seuls 8 € reviennent à l’agriculteur, note encore le syndicat. La FNB a quant à elle souligné un prix éleveur « plus que jamais cadenassé par les opérateurs d’aval », rappelant qu’il manque 50 centimes par kg de carcasse à la rémunération des producteurs, « une somme minime s’il fallait qu’elle soit répercutée jusqu’au consommateur (11 euros au total sur une année) ».

Besoin de transparence et de confiance

Et la distribution ne semble pas non plus sortir gagnante de ces baisses de prix. Certains rayons affichent d’ailleurs une marge nette négative, comme la boucherie (- 1,2 %), la marée (- 4,4 %) et la boulangerie-pâtisserie (- 1,4 %), des rayons fréquentés mais qui nécessitent une main d’œuvre importante en terme de service. La Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD) a d’ailleurs elle aussi communiqué après la publication du rapport, rappelant que la moyenne des marges nettes des rayons étudiés par l’Observatoire était en baisse depuis trois ans, s’établissant en 2013 à 1,1 % contre 1,9 % en 2011. Si la distribution ne répercute pas l’augmentation du prix des matières premières, c’est également pour continuer à attirer le consommateur et notamment supporter « le contrecoup de la croissance de la vente en ligne non alimentaire », fait remarquer Philippe Chalmin qui constate que dans ce combat, « il n’y a ni vainqueur, ni vaincu, il y a des blessés, des morts et des survivants ». L’exacerbation des tensions de ces derniers mois est essentiellement « basée sur l’absence de confiance entre les membres », poursuit-il en constatant que si les « grand-messes » comme celles de présentation du rapport sont jugées très utiles au dialogue par le ministre de l’Agriculture – venu introduire la conférence de presse -, elles sont aussi le signe « que les intéressés ne vont pas à la messe quotidienne ». « Le drame, c’est qu’il y ait besoin de ces grand-messes pour relancer l’amour du prochain, or c’est bien ce qu’il manque le plus dans ces relations interprofessionnelles qui ont du mal à digérer le passage du stable à l’instable dans le monde agricole », conclut-il. Un constat d’autant plus amer que le seul gagnant, le consommateur, n’est pas forcément conscient de sa chance puisqu’il achète de plus en plus de produits élaborés et transformés qui ne permettent pas de se rendre compte de la stabilité des prix.

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