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Maladies des céréales / Si la lutte chimique, bien positionnée, est une réponse efficace aux maladies en végétation, elle ne doit pas être le seul recours. Une approche agronomique globale intègre la protection de la culture en amont du semis et allège la facture de la lutte en végétation.

Les « bonnes pratiques prophylactiques », qui visent à prévenir l’apparition ou la propagation d’une maladie sont parfois oubliées, voire négligées, au profit d’une lutte chimique à laquelle une grande confiance est accordée… La prophylaxie est pourtant essentielle pour lutter ou limiter l’impact de certains pathogènes, contre lesquelles la lutte chimique n’est pas l’unique solution… Le tableau 1 permet de situer les potentialités de chaque technique pour lutter contre les principales maladies du blé.

Combiner les leviers agronomiques
Quelques repères agronomiques permettent d’apprécier l’incidence de chaque technique de culture sur la pression de chaque maladie du blé (tableau 2). L’essentiel est de privilégier la bonne combinaison de pratiques agronomiques au sein d’un même itinéraire. Et de ne jamais oublier qu’il n’y a pas qu’une seule maladie.
Parmi les leviers à activer, notons en premier lieu le choix des successions de cultures. Pour la plupart des parasites, une succession de blé sur blé favorise leur développement. Le travail du sol a aussi son importance, car l’enfouissement des résidus de culture après récolte limite le développement des maladies. Le choix des variétés intervient également car les variétés ne sont pas toutes égales face aux pathogènes. Certaines témoignent d’un bon indice de résistance, pas toujours bien valorisé en pratique. Enfin, les paramètres d’implantation sont déterminants. La densité de semis pour commencer : plus le semis sera dense, plus les conditions du milieu seront favorables aux maladies. À l’inverse, les très faibles densités peuvent limiter la pression de maladie, mais aussi affecter le rendement. Un compromis est à trouver. Les dates de semis jouent aussi : plus le semis est précoce, plus la culture est exposée aux différents cycles de multiplication du pathogène. Terminons avec la fertilisation azotée : plus la dose d’azote est forte, plus le niveau de la maladie sera élevé. La plante gagnant en vigueur et en feuillage, le champignon trouve alors un contexte idéal pour se développer.
Chaque maladie ayant son propre développement, les réponses prophylactiques les plus adaptées ne sont pas les mêmes selon les pathogènes.

Fusariose
Haro sur les résidus végétaux

Dans le cas de la fusariose des épis, une grille agronomique d’évaluation du risque d’accumulation de DON dans l’épi est disponible depuis 2005 sur blé tendre et 2008 sur blé dur. Elle prend en compte trois critères parcellaires afin de positionner chaque parcelle dans l’un des sept niveaux de risque. La gestion des résidus (précédent et travail du sol) et la sensibilité variétale à la fusariose sont déterminantes. En effet, le principal producteur de DON sur blé, Fusarium graminearum, passe l’hiver dans les résidus de culture. Aussi, la rotation a une grande importance dans la maîtrise du risque d’infection. Les précédents sensibles, laissant derrière eux des résidus contaminés, sont à éviter.
À défaut, le labour, ou a minima, l’enfouissement des résidus, sont à rechercher. Un simple broyage des résidus facilite leur décomposition et, sans être totalement efficace, réduit la pression de maladie.
La date de semis peut jouer un rôle en influençant la date de floraison et le synchronisme avec les libérations d’ascospores. La densité peut aussi influencer la contamination en faisant obstacle à la dispersion des ascospores. Plus le couvert est dense, moins les risques de contamination sont importants.
Du côté de la fertilisation, l’azote augmenterait la gravité des attaques, en favorisant l’humidité dans le couvert.
Le choix variétal est l’autre levier majeur pour lutter contre les fusarioses de l’épi. Si la résistance n’est pas totale, il est possible de lutter efficacement contre la maladie en choisissant des variétés adaptées. n

Piétin-verse
Il préfère les rotations chargées en blé

Le piétin-verse est une maladie dont la forme sexuée semble de faible importance. Il en résulte au plan pratique que la maladie est endémique, c’est-à-dire inféodée à la parcelle (peu ou pas de transport sur de longues distances) et dépendante de son histoire culturale. Les successions de blé sur blé ou les rotations courtes favorisent la maladie qui se maintient d’une saison à l’autre sur les résidus de culture. Leur enfouissement, dans le cas d’un blé/blé, pourra être bénéfique en éloignant en fond de labour les résidus infectés. Mais dans d’autres cas, une rotation maïs/blé par exemple, le labour contribue à exhumer des résidus enfouis l’année précédente, et dont le pouvoir infectieux (sporulation) est stimulé par le retour en surface. Le travail du sol peut donc avoir des effets variables selon la manière dont il interagit avec la rotation.
Les dates de semis précoces, dans la mesure où elles rendent possible des contaminations plus tôt à l’automne, favorisent le développement du piétin-verse. Cet effet est clairement perceptible en essai. Les fortes densités favorisent les contaminations par « effet de proximité » entre tiges. Les semis clairs, en accentuant le tallage, peuvent, à l’inverse, protéger les talles principales. L’azote aurait logiquement le même effet, mais les fortes doses d’azote semblent au contraire favoriser la maladie, selon un mécanisme inconnu.
Les gènes de résistance PCH1 (issu d’Aegilops ventricosa) et PCH2 (issu de Capelle) confèrent un bon niveau de résistance, surtout lorsque les deux gènes sont cumulés. L’efficacité ainsi obtenue dépasse celle des meilleures protections fongicides. n

Contrôle de la septoriose
Miser sur le choix variétal

Le rôle des repousses dans les contaminations de septoriose est mal connu. Elles peuvent, en hébergeant la maladie, contribuer à la formation de l’inoculum de départ sous forme d’ascospores. Les blés sur blés, combinés à une absence de labour, favorisent la maladie. D’une manière générale, la présence de résidus pourrait participer à l’initiation de l’épidémie. Mais à la différence du piétin-verse, la septoriose n’est pas une maladie à caractère parcellaire. L’inoculum initial n’est pas limitant. S’agissant de la date de semis, on constate généralement moins de septoriose sur les semis tardifs. Cela tient principalement au fait que les semis tardifs échappent aux premières contaminations par voie ascosporée. Le point initial de l’épidémie étant plus tardif, l’inoculum est moins abondant en sortie d’hiver. Cet effet, combiné à une structure différente du couvert (moins de talles), débouche sur des différences de dynamique de l’épidémie qui, certaines années, sont notables en fin de saison.
Du côté des densités, plus elles sont élevées, plus la pression maladie est forte. L’expérience le prouve, mais l’effet reste irrégulier. La structure du couvert est probablement la meilleure explication, les conditions d’hygrométrie pouvant être très différentes à l’intérieur du couvert selon la densité. Par ailleurs, à forte densité, les contacts entre feuilles sont favorisés.
On observe également des effets marqués de l’azote. Certains essais montrent que diviser la dose d’azote par deux est aussi efficace que de doubler la protection fongicide. Mais la pénalité sur le rendement est inacceptable. Quant à la résistance variétale, des solutions existent, y compris parmi les variétés les plus cultivées. Mais l’efficacité n’est que partielle et la résistance, comme pour d’autres pathogènes, est sujette à contournement. L’intérêt des mélanges variétaux continue à être évalué.

Rouille brune et rouille jaune
Des techniques prophylactiques similaires

La rouille brune se conserve en été sur les repousses de céréales. Une canicule estivale, comme 2003, peut alors réduire considérablement le niveau d’inoculum. Le travail du sol est généralement considéré comme sans incidence sur la gravité des épidémies, l’essentiel de l’inoculum initial provenant de repousses ou d’un champ de blé voisin.
La date de semis influence très nettement la maladie, en permettant au pathogène d’accomplir un nombre de cycles plus ou moins important pendant l’hiver. De ce fait, les semis tardifs sont moins touchés par la maladie. Les densités de semis élevées seraient plus favorables à la maladie. Le choix variétal reste la valeur la plus sûre pour lutter efficacement contre la maladie. De nombreux gènes de résistance sont disponibles, mais certains d’entre eux sont déjà contournés par de nouvelles races. Les mélanges variétaux ont démontré une certaine efficacité sur des pathogènes comme les rouilles.
Les techniques prophylactiques pour lutter contre la rouille jaune sont assez similaires à celles utilisées pour combattre la rouille brune. En effet, ces deux champignons ont un cycle de développement proche, à la différence que la rouille jaune préfère les printemps frais et pluvieux.

Jean-Yves Maufras
(Arvalis – Institut du végétal)

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