Manifestation / Le 8 octobre, à l’appel de la FDSEA et des JA de Haute-Saône, 160 tracteurs ont convergé vers Vesoul, où plus de 230 agriculteurs se sont retrouvés pour adresser « un coup de semonce », et dénoncer le dénigrement dont ils se sentent victimes. Travailler beaucoup, gagner peu, produire bien, et être déconsidéré : le mélange n’est pas viable et met l’agriculture française en péril.

Dans tout le pays, les agriculteurs ressentent comme une injustice le traitement médiatique dont ils font l’objet. Habitués à affronter les aléas climatiques contraires ou les conjonctures économiques difficiles, prêts à relever les défis techniques toujours plus pointus, ils refusent de porter en plus le fardeau de la culpabilité que l’on veut leur faire endosser.

170 tracteurs : un record en Haute-Saône
Ce n’est donc pas précisément une réponse à une attaque précise qui les a faits se mobiliser en masse ce mardi 8 octobre, dans toute la France et en particulier en Haute-Saône. C’est plutôt une accumulation de petits sabotages, de fausses informations les concernant, de procès en sorcellerie, de débats absurdes qui les met en colère.
Dernièrement, c’est Ségolène Royal qui en a été la parfaite illustration : Sa méconnaissance du dossier agricole et sa force de frappe médiatique sont représentatifs de ce qui blesse l’agriculture française : des attaques injustifiées, surtout en regard de la qualité et de la sécurité de l’alimentation dans notre pays.
D’où la colère sourde qui gronde dans les fermes. D’où aussi l’appel à mobilisation lancé par la FNSEA la semaine dernière, et relayé par la FDSEA 70 et les JA de notre département. La réponse a été au-delà des espérances. Alors que les organisateurs tablaient sur une centaine de tracteurs, ce sont 160 tracteurs et plus de 230 participants qui se sont regroupés, dans le calme, sur le site Interval de Vaivre, près de Vesoul.

Le « en même temps » ne marche pas en agriculture
Le site en lui-même a à peine suffi à contenir tous les tracteurs. Une chance encore qu’un chargement de train ait été annulé en dernière minute, « sans quoi on n’aurait pas pu ouvrir aux tracteurs toute la partie près de la voie de chemin de fer » explique Didier Vagnaux le président d’Interval.
Le site a donc été bien utile, à la fois pour ne pas rentrer en conflit avec les autorités (il s’agit d’un site privé) et pour pouvoir parler à l’aise. « Le ‘en même temps’ qu’on entend beaucoup dans les couloirs parisiens ne marche pas en agriculture », estime Thierry Chalmin : à la fois assurer « que ça ira mieux pour les agriculteurs » et leur imposer des ZNT démesurées, à la fois demander de « monter en gamme » et importer de la viande d’Amérique du Sud.
« Nous avons la fierté de nourrir nos concitoyens, c’est ça qui nous anime. Qu’on nous traite d’empoisonneurs, ça me dégoûte », regrette un manifestant. Gérald Pichot, le président des JA, résume le mal-être des agriculteurs : « Nous avons l’agriculture la plus sécurisée du monde, nous améliorons les pratiques d’année en année, nous améliorons l’impact de notre activité sur l’environnement… Tout ça pour subir des attaques de plus en plus violentes. Nous ne comprenons pas. »
Emmanuel Aebischer, président de la FDSEA, prévient que le mouvement aura une suite : « Aujourd’hui, c’est un coup de semonce, un coup de gueule organisé par la FNSEA. Mais il y aura d’autres journées de mobilisation, car on ne peut pas continuer sur cette voie. Celle du dénigrement, et celle de l’hystérie : 10m, 20m, 150m, demain 1km [de ZNT] ? »

Les visages sont fermés
Sur les tracteurs, les pancartes résument le message : Beaucoup de « France, veux-tu encore de tes paysans ? », mais aussi des « agriculture en danger », « non au CETA, Mercosur, ZNT », « pas de pays sans paysans »… On a aussi pu lire des messages plus poignants, « un agriculteur se suicide tous les 2 jours en France », ou « l’agriculture, enfant on en rêve, adulte on en crève ». Des messages plus personnels aussi, comme ce « merci pour la plainte, Barbara », qui évoque avec ironie la procédure judiciaire engagée contre les agriculteurs par le député de la première circonscription de Haute-Saône.
On a compté beaucoup de jeunes dans les cortèges, inquiets pour leur avenir, devant supporter en plus des difficultés du métier les critiques injustifiées. Une ambiance bon enfant, cordiale même, mais peu de sourires dans les cabines où les visages étaient plutôt fermés en passant devant la préfecture. Ce n’est clairement pas de gaieté de cœur que les agriculteurs sacrifient une journée de travail pour organiser cette démonstration de force, qui en appellera sûrement d’autres.

LD

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