Session Chambre / Avec l’installation d’une usine Hermès à Héricourt en 2015, compte tenu des difficultés d’approvisionnement de la filière en peaux de veau de qualité, une démarche a été mise en place pour tracer les cuirs et définir les facteurs principaux influant sur leur qualité. Avec l’idée, à terme, de mieux valoriser cette partie du 5e quartier.
Depuis 2015 et l’installation de sa manufacture à Héricourt, l’entreprise Hermès possède trois sites de production dans notre région : Allenjoie (25), Seloncourt (25), et Héricourt. Or pour approvisionner ces sites, le maroquinier a besoin de cuirs de veau, d’excellente qualité. Problème : la France manque de cuirs de veaux. D’après une étude commandée en 2013 par France Agrimer, la France est en effet le 1er pays producteur de veaux en Europe… mais 50 % des peaux de veaux tannées utilisées localement sont importées.
Parmi les filières du cuir, la filière « veau » est encore la seule qui bénéficie d’un vrai débouché industriel : on estime ainsi que 30 % du gisement est valorisé par l’industrie du luxe dynamique. Mais entre une peau de veau destinée à l’industrie du luxe (80-95 €/pièce) et une peau de veau « gallée » (35 €), il existe un énorme différentiel de valorisation.
Un animal mal élevé « n’est pas bien dans sa peau »
Ce type de dévalorisation a incité les acteurs à travailler sur la qualité tout au long de la chaîne d’approvisionnement. L’idée est de comprendre les critères qui permettent d’obtenir une peau bien valorisée par l’industrie. Jocelyn Roggy est négociant en peaux, et à ce titre administrateur à la SAVS (société d’Abattage des Vosges Saônoises). « Un animal mal élevé n’est pas bien dans sa peau », a-t-il ainsi expliqué lors de la session de la chambre d’agriculture, qui se tenait le 20 juin à la mairie de Luxeuil Les Bains.
Pour le moment, les cuirs qui alimentent l’industrie du luxe ne sont pas tracés. On ne sait pas exactement de quel élevage ils proviennent, ni a fortiori de quel animal. On a pourtant déjà essayé d’améliorer la traçabilité des cuirs. La filière a déjà testé des méthodes de suivi, et des essais ont été réalisés (notamment en Dordogne) pour pallier ce manque. Deux raisons poussent l’industrie du luxe à s’y pencher de plus près : le bien-être animal d’une part, et l’amélioration des pratiques d’élevage de l’autre.
Bien-être animal et traçabilité
Pour le bien-être animal, il s’agit d’anticiper la demande des consommateurs. Les clients qui mettent plusieurs milliers d’euros (parfois plusieurs dizaines de milliers) dans un sac à main tiennent à s’assurer que l’animal dont la peau a servi à la confection du sac a été traité dignement.
Quant aux raisons techniques, elles sont plus complexes. « La qualité d’un cuir est liée à de nombreux facteurs » explique Jocelyn Roggy. Les plus évidents sont les blessures (un accroc dû à un boulon proéminent sur la niche du veau par exemple) et les maladies de peau (parasitoses, gales et dartres notamment). Ce sont également les problèmes les plus faciles à régler. Mais pour le reste, on connaît peu les facteurs qui influent sur la qualité des peaux, notamment la beauté du veinage. Et si on connaît mal, c’est aussi qu’il n’existe pas de base de données suffisamment importante pour mettre en relation une qualité de cuir, et une alimentation par exemple.
Le laser grave le code barre
Avec l’essai en cours, des données vont donc être collectées en ce sens. En pratique, l’opérateur va scanner le code barre de la boucle du veau, et un laser va le reproduire sur le cuir, côté fleur. On pourra alors remonter du cuir à l’animal, et pourquoi pas en tirer des enseignements zootechniques.
Le 21 juin, le sénateur Michel Raison accompagnait le responsable des achats cuir de chez Hermès sur un élevage du canton de Dampierre sur Salon. Une remontée de la chaîne de production pour essayer de recréer du lien entre les différents maillons. Avec bien sûr l’idée de faire redescendre aussi de la valeur ajoutée à l’éleveur.
LD