Viticulture / Les gelées tardives qui ont frappé le département en avril ont touché durement certaines parcelles dans le charcennais. Un épisode difficile qui n’augure pas une bonne récolte et qui rappelle les froids tardifs d’avril 1991.
Les épisodes de gel tardif que nous avons connus fin avril auront laissé des traces. Parfois de bonnes traces : les renouées du japon en bord de route ont pratiquement toutes été détruites, laissant de grandes tiges rouges molles qui finissent par tomber pour reprendre péniblement du pied. Pour les agriculteurs en revanche, la période de froid a pu causer des dégâts, notamment sur les vignes.
Comparable au printemps 1991
Au vignoble Guillaume à Charcenne par exemple, les dommages sont considérables. « En Chardonnay, on s’attend à 60 ou 70 % de perte, constate Henry Guillaume. En pinot, moins sensible, ce sera plutôt 40 ou 50 % de perte ». De fait, on a pu voir des parcelles avec la totalité de la surface foliaire détruite. Les conséquences seront donc importantes sur la récolte, mais aussi sur la charge de travail ce printemps : « Il faut que la partie grillée tombe et émette à nouveau un contre-bourgeon. Ensuite, il va falloir remonter à la main toutes les repousses, pour ne pas qu’elles tombent par terre. C’est comme si on devait faire deux fois le travail sur le palissage cette année. » De mémoire de vigneron, une telle situation avait déjà été connue en 1991, avec -9 °C enregistrés à Charcenne le 23 avril (donc pire que cette année). Les rendements avaient été catastrophiques, 1hL/ha en chardonnay (contre 60 habituellement) et 1,5 hL/ha en pinot (contre 45-50). « Au 15 juin 1991, il n’y avait pas un seul bourgeon ; c’était comme au 15 février. »
Les 3 rattrapages de la vigne
Cette année heureusement, la situation est moins avancée. « L’enjeu est d’avoir du bois de taille pour l’année suivante, explique François d’Andresy, ingénieur agronome et responsable technique dans une exploitation viticole à Brains (44). Normalement ce sont les bourgeons de l’année qui partent, mais il y a plusieurs rattrapages possibles. D’abord les bourgeons des années précédentes, enfouis dans le bois. Ces yeux vont finir par ressortir, mais ils sont généralement moins fertiles et ne feront que peu de fleurs. Il y a aussi au pied des bourgeons de l’année des contre-bourgeons, qui peuvent ressortir mais eux aussi avec des demi-grappes attendues. Enfin, si seul l’apex du rameau de l’année a gelé, on peut voir ressortir les bourgeons d’entrecœur, qui partent de l’aisselle des feuilles. » Autant de façons pour la vigne de récupérer de son traumatisme. Pour le viticulteur, c’est donc une mauvaise année à passer, du travail en plus, mais heureusement pas d’impact à long-terme. « En 1992, l’année suivant le gel, se rappelle Henry Guillaume, on a récolté 70 hL/ha sur le chardonnay, 60 sur le pinot. Soit 10 % de plus qu’une année normale. ». La plante va en effet stocker des réserves, à défaut de produire du fruit.
La paille brûlée à Champlitte
La vague de froid a été inégale sur le département. A Champlitte par exemple, c’est au début de la vague de froid (mesurée du 18 au 24 avril) qu’ont eu lieu les dégâts. « Environ 10 % », estime Alain Joyandet le nouveau propriétaire des vignobles chanitois. Les jours suivants, des bottes de paille ont été disséminées dans les parcelles et leur consumation a permis de limiter les pertes. « Dans le cas de gel radiatif, explique encore François d’Andresy, il peut être intéressant de brûler de la paille car cela crée une fumée qui sert d’écran. D’autres méthodes existent, comme le brassage de l’air, ou encore la prophylaxie, qui se résume souvent dans ce cas à éviter les conditions humides. » Nous nous souviendrons de stocker du cru 2017, car ce qui est rare, est cher… n LD