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Crise laitière / Les prix du lait au producteur ne remontent pas, et les éleveurs produisent à perte depuis plusieurs mois. Mardi soir, une quarantaine d’éleveurs ont marqué leur colère en vidant une citerne de lait, à Dampierre sur Linotte.

Après des mois de crise, les producteurs de lait sont usés. Produire à perte, ils « savent le faire quelques mois », en attendant que ça passe. Mais accepter durablement des prix de lait en dessous des coûts de production, ils ne peuvent pas. Mardi soir, une quarantaine de producteurs, à l’appel de la FDPL et des JA de Haute-Saône, ont intercepté et vidé une citerne de lait sur la D 26, à la limite des communes de Dampierre sur Linotte et de Vallerois le Bois.

Les résultats des industriels du lait
La principale récrimination des éleveurs est l’injuste répartition de la valeur ajoutée sur le lait. En 2015, alors que le prix du lait au niveau mondial dégringolait de plus de 50 €/1.000 L (voir p. 7 à ce sujet), la quasi-totalité de cette chute était répercutée sur le prix au producteur, provoquant des situations parfois catastrophiques dans les trésoreries. De leur côté, les entreprises laitières réalisaient une année plutôt confortable. Les chiffres publiés par 3 des plus grands groupes privés français (Lactalis ne publie pas les siens) sont éloquents : les résultats nets de Danone, Savencia (Bongrain) et Bel ont augmenté respectivement de 14,7 %, 43,6 %, et 49,6 % en un an. Ce sont les chiffres mis en avant par le président de la FDPL Emmanuel Aebischer (et disponibles effectivement sur les sites des entreprises) pour expliquer en partie leur action « coup de poing ». « Ils ont publié leurs chiffres, complète le président de la FDSEA Sylvain Crucerey. Cartes sur table, nous aussi nous les invitons à la maison des Agriculteurs, nous leur présenterons les nôtres. »

Le dialogue rompu
Faut-il en passer par là pour amorcer la discussion ? « Il n’y a malheureusement déjà plus de discussion », regrette l’agriculteur, qui constate que « même au sein des OP, ça ne fonctionne plus. » Il est vrai que les OP locales des producteurs Lactalis ne parviennent pas à avoir de discussions sur le prix, la maison mère ayant fait le choix de n’aborder le sujet qu’au niveau national. A Bulgnéville, le 22 janvier, les représentants de l’Apllage (OP Lactalis Grand-Est) avaient boycotté la réunion, faute de pouvoir avancer dans les négociations.
Sur les 5 premiers mois de l’année, les prix dans le département vont de 265 € pour Lactalis, 275 pour Sodiaal (en comptant 10 % de B), 280 pour Aboncourt, 289 pour Savencia, 291 pour Ermitage, 298 pour Mulin, 300 pour Milleret. Juin n’est pas encore fixé partout (alors que la loi l’impose, voir en p. 11), mais si rien de change, les écarts vont encore se creuser entre ceux qui collent aux accords contractuels, et ceux qui adoptent une politique de partage des marges : Aboncourt a déjà annoncé 320 à partir de juin, Milleret semble coller au 300, Mulin également…

Vers une prise en compte des coûts de production
En fait, « tout le système est à revoir dans le mode de paiement du lait », affirme Emmanuel Aebischer, et cela passe par un « rétablissement du rapport de force » complète Sylvain Crucerey. Certains l’ont compris, et des entreprises ont déjà commencé à adopter un fonctionnement plus « durable ». L’OP Jura-Bresse dans le Jura, présidée par Emmanuel Courvoisier, a négocié avec Danone un accord pluri-annuel pour un prix de lait payé en fonction des coûts de production. Des discussions seraient également en cours chez Milleret pour trouver des solutions analogues et en tout cas mieux répartir le risque et les bénéfices tout au long de la filière laitière.

LD

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