Alimentation minérale du troupeau / Difficile à détecter, l’hypocalcémie chronique a des répercussions sur la santé et la production de la vache laitière, et des impacts économiques majeurs. Sa prévention s’appuie sur une stratégie de maîtrise de l’alimentation pendant la phase de tarissement : densité énergétique modérée et équilibre minéral de la ration.

Une étude française de 2014 a montré que l’hypocalcémie subclinique touche environ un quart des vaches laitières primipares et la moitié des multipares. Une prévalence donc bien supérieure à celle de la forme clinique – connue aussi sous le nom de fièvre de lait – et dont l’impact économique est estimé quatre fois supérieur, à travers ses conséquences sur la santé des animaux et leur production laitière. Le calcium est un des macroéléments, ou éléments minéraux majeurs, incontournables au bon fonctionnement de l’organisme, et il joue un rôle physiologique déterminant (lire encadré).

Santé de la mamelle, tonicité du rumen
Un apport minéral déséquilibré par rapport aux besoins se traduira par des effets négatifs. Dans le cas du calcium, une carence importante provoquera ainsi fièvre de lait, boiterie chronique, fractures osseuses, ostéomalacie (déminéralisation des os). Un excès, à contrario, réduira l’absorption du cuivre et du zinc. Si la prévalence des hypocalcémies cliniques a tendance à diminuer, et ne touche que 3% des vaches laitières, les spécialistes de l’alimentation du troupeau mettent en garde face aux conséquences de la forme subclinique de l’hypocalcémie, dont les symptômes sont plus difficiles à repérer. Elles sont en relation avec le rôle du calcium dans l’immunité (fonctionnement des neutrophiles) et dans les contractions musculaires. Dans la sphère de la santé de la mamelle, une carence en calcium induira une moindre tonicité des tissus responsables de la fermeture du trayon. Conjugué avec une dépression immunitaire, cet effet favorisera l’apparition et la gravité des mammites. Au niveau digestif, la fréquence et l’intensité des contractions ruminales seront affectées, d’où une baisse de l’ingestion, un risque accru de déplacement de la caillette, des réserves lipidiques davantage mobilisées pour assumer la production laitière et une éventuelle cétose… La reproduction peut aussi être affectée, via des défaillances de tonicité de l’utérus, et des risques accrus de métrites.

La période critique du vêlage
Selon les spécialistes, on parle d’hypocalcémie subclinique lorsque la calcémie descend en dessous de 80 mg/L, sans provoquer de signe clinique, la calcémie normale chez la vache étant supérieure à 85 mg/L. 10 à 50 % des vaches peuvent rester en hypocalcémie subclinique jusqu’à 10 jours après le vêlage. Cependant, la majorité des vaches retrouvent une calcémie normale dans les 2 à 3 jours qui suivent le vêlage.
Les causes favorisant l’hypocalcémie sont très liées à la conduite du troupeau et en particulier au pilotage de l’alimentation des vaches taries. Un apport excessif de calcium dans la ration durant le tarissement provoque en effet une suspension des mécanismes hormonaux de régulation de la calcémie sanguine. Or juste après le vêlage, la production de colostrum entraîne une forte demande en calcium. La fréquence de troubles hypocalcémiques augmente aussi avec le nombre de lactationsv, car avec l’âge, les vaches perdent une partie de leur capacité à absorber le calcium par voie intestinale et à mobiliser leur calcium osseux. Une alimentation riche en potassium (un cation) pendant la période de transition constitue également est un facteur favorisant, car un taux élevé de cations dans le sang augmente le pH sanguin et inhibe en partie la capacité à mobiliser le calcium osseux. De même, une trop grande richesse de la ration en phosphore inhibe une des hormones régulant le calcium sanguin… 

Conduite alimentaire spécifique
Une conduite alimentaire spécifique pendant le tarissement reste l’axe prioritaire de prévention de l’hypocalcémie clinique comme chronique. Elle s’appuie sur une séparation effective du lot des vaches taries du reste du troupeau. Ainsi, on pourra limiter les apports en calcium pendant les quatre semaines qui précèdent le vêlage, en jouant sur la composition de la ration. Pour cela, on limitera la distribution des fourrages riches en calcium, tels que légumineuses (luzerne, trèfle), crucifères (chou, colza) ou pulpe de betterave. On veillera également à éviter les excès de phosphore et à prévenir les déficits en magnésium. Limiter les apports de potassium reste plus complexe, car les fourrages sont naturellement assez bien pourvus dans cet élément.
Enfin, la densité énergétique de la ration distribuée aux taries est aussi à surveiller. Une suralimentation énergétique favorise la constitution de réserves lipidiques et prédispose à l’apparition du syndrome de la vache grasse. Le foie, engorgé, voit son efficacité diminuer et cela affecte la synthèse de vitamine D.
N’oublions pas, non plus, d’évoquer les facteurs environnementaux « d’ambiance », qui doivent aussi être maîtrisés au tarissement pour prévenir les pathologies autour du vêlage : il s’agit de l’hygiène de l’environnement, du confort (accès à l’auge et à l’eau, sols non-glissants), des interactions sociales, etc.

AC

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