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Filière porcine / Faute d’une journée régionale porcine, à cause des contraintes sanitaires, les acteurs de la filière étaient conviés par Interporc à une visioconférence sur un enjeu très actuel. Patrick Chevillon, de l’Ifip, a développé le thème de l’arrêt de la castration à vif, ses alternatives et leurs conséquences pour tous les maillons de la filière. 

Une trentaine de participants se sont connectés, le 9 décembre dernier, à la visioconférence organisée par Interporc sur le sujet de l’interdiction de la castration à vif des porcelets mâles. « Cette rencontre virtuelle a permis à des représentants des maillons de toute la filière, éleveurs de porc aussi bien qu’abatteurs et transformateurs ou salaisonniers, de bénéficier d’un éclairage très exhaustif sur la question, avec un état des lieux de la situation chez nos voisins européens et un point sur les différentes options possibles. Tous ces éléments vont les aider à réfléchir pour trouver ensemble
des solutions réalistes et économiquement viables », explique Romaric Cussenot, le directeur d’Interporc. En effet, un arrêté paru au Journal officiel du 27 février 2020 prévoit la mise en œuvre de cette interdiction à partir du 31 décembre 2021. Un autre arrêté paru au JO le même jour autorise les éleveurs à réaliser « l’application de tout traitement analgésique ou anesthésique local visant à atténuer ou supprimer la douleur ». Rappelons que la pratique “historique” de la castration des porcs mâles est un moyen d’éviter les mauvaises odeurs – dites odeurs de verrat – lors de la cuisson de la viande. La castration a également l’avantage de réduire l’agressivité des mâles, d’inhiber le comportement sexuel et in fine de faciliter leur conduite par l’éleveur.

Une grande diversité de situations
Patrick Chevillon, expert en qualité de la viande des porcs non-castrés à l’Institut français du porc (Ifip), a dressé dans la première partie de son intervention un panorama des pratiques européennes et de leurs évolutions au cours des deux dernières décennies, chiffres à l’appui. Rappelons que l’Ifip a rejoint en 2017 et coanime le réseau européen IPEMA qui vise à échanger sur cette thématique des alternatives à la castration. « En Europe le tiers des éleveurs ne castre plus les mâles, avec un fort développement en Hollande, Allemagne et France entre 2009 et 2017 puis une stabilisation et un léger développement de 2016 à 2018 à la demande de la grande distribution en Allemagne. » 28 % des producteurs en France produisent désormais du mâle entier notamment à l’instigation du groupe Cooperl qui a stabilisé sa production de mâles entiers à 85 % de ses éleveurs : cela représente 2,8 millions de porcs charcutiers mâles abattus. La Belgique a opté pour une autre alternative : l’immunocastration, de même que l’Espagne sur des marchés de niche (ce dernier pays, comme le Portugal, produit historiquement essentiellement très majoritairement des mâles entiers, réservant la castration à des cas particuliers). L’intérêt économique cité par ces pays s’établirait à 5 à 7 € par porc mâle entier avec la tentation pour les abattoirs de diminuer le prix d’achat, de 2 à 3 €/porc depuis 2014. « L’Allemagne s’était engagée à arrêter la castration à vif au
1er janvier 2019 mais a demandé un report de deux ans de l’échéance pour se préparer. Les Danois fournisseurs de porcelets ont généralisé la castration sous anesthésie locale afin de fournir le marché allemand en porcelets. » Une bonne partie des naisseurs allemands se préparent à adopter la castration sous anesthésie, avec le soutien de l’Agence fédérale de l’agriculture et de l’alimentation (BLE) qui subventionne les achats d’appareils d’anesthésie à l’isoflurane : près de 4 200 dossiers de demande de subvention avaient été reçus fin septembre dernier, ce qui représente environ 60% des 7 000 élevages de truies.
Depuis 2014, l’IFIP participe aussi à plusieurs programmes de recherches européens de la DG SANCO (Europe) sur les attentes des consommateurs et la détection des carcasses odorantes dans le monde. « La détection rapide et fiable des carcasses odorantes à l’abattoir reste un sujet d’intérêt majeur pour l’Institut, expose Patrick Chevillon. Outre l’intérêt technique pour les filières, ces méthodes pourront être utilisées en sélection génétique ou dans d’autres études faisant le lien entre les conditions d’élevage et de préparation des porcs à l’abattoir et la fréquence de risque de carcasses odorantes. »

Nez humains ou spectrométrie de masse ?
Actuellement, les abattoirs abattant des mâles entiers et souhaitant apporter une garantie sur l’odeur à leur client pratiquent majoritairement la détection par « nez humain » sur la chaîne d’abattage après avoir chauffé le gras, avec un coût estimé à 0,25 € par mâle entier. Mais des alternatives prometteuses sont aussi en cours de développement. « Le Danemark a annoncé disposer d’une méthode chimique robotisée pour mesurer les molécules de scatol et androsténone (incriminées dans l’odeur de verrat) directement dans le gras à l’abattoir. Le principe est de préparer un échantillon de gras puis de le chauffer avec une diode laser et d’envoyer le gaz sur un spectromètre de masse. La méthode est précise, répétable et donne une valeur objective. Les contraintes sont la préparation de l’échantillon (10 minutes entre le prélèvement et la fin de la préparation) et la gestion de la traçabilité en abattoir. »

AC

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