Maïs ensilage / Les conditions météorologiques particulières de cette année ont eu des répercussions sur les maïs destinés à l’ensilage : teneurs en lignine élevées, fécondation incomplète des épis, feuillage précocement jaunis… autant de paramètres dont il faut tenir compte pour tirer le meilleur parti de ce fourrage.
L’année climatique 2015 s’est caractérisée par plusieurs épisodes caniculaires, conjugués à des stress hydriques plus ou moins intenses selon les types de sols, peu favorables à la culture du maïs fourrage. Dès fin juin, les effets de la sécheresse ont été amplifiés par une forte chaleur : certaines plantes trop chétives n’ont peu ou pas fleuri et la fécondation des épis a été irrégulière. Certes les maïs ont reverdi suite aux pluies d’août, mais les épis (qui constituent une part importante de la valeur fourragère finale de l’ensilage) sont dans certains secteurs nombreux et contiennent peu de grains (moins de 400 pour les plus beaux). Par ailleurs, on observe localement de fortes attaques de charbon ainsi que de pyrale.
Décisions difficiles
« Les premiers résultats d’analyses réalisées en Haute-Saône, observe Honorine Adam, de Haute-Saône Conseil Elevage, montrent des situations très hétérogènes, mais une tendance plutôt “sèche” se dessine, avec plusieurs teneurs en matière sèche des plantes entières au-delà de 35 %. Ces valeurs sont liées à l’état de maturité avancé des épis : les épis sont quasiment assez secs pour être récoltés en grains ! De plus les hauteurs de végétation plus faibles que d’habitude modifient le rapport épi sur plante entière. » Difficile, dans ces conditions, de parler de « stade optimal » de récolte. Une partie des maïs destinés à la production de grains sera aussi récoltée sous forme d’ensilage pour faire face à un manque de fourrage. « Ces variétés sont moins digestibles que les variétés destinées à l’ensilage, note la conseillère : aussi dans la mesure du possible il serait judicieux d’ensiler ces parcelles simultanément avec celles de maïs ensilage, et d’incorporer la récolte dans le même silo, en alternant les couches, de manière à pouvoir disposer du fourrage le plus homogène possible. Autrement, on risque d’avoir des problèmes cet hiver avec des soucis de transition alimentaire. »
On sait que c’est entre 30 et 35 % de matière sèche « plante entière » que le maïs fourrage offre le meilleur compromis entre productivité, sécurité de la récolte, intégrité maximale de la tige, conservation optimale, avec un niveau d’ingestion élevé qui permet une forte production de lait ou de viande. Au-delà de 35 %, comme ce sera donc souvent le cas cette année, la limite est plus technique qu’alimentaire : le silo est plus délicat à tasser, et la conservation plus difficile. 30 à 35 % est donc le niveau de matière sèche qu’il faut viser, et pour cela l’observation des différents types d’amidon lors du remplissage du grain est un précieux indicateur. Mais cette année plus que d’habitude les cas particuliers sont nombreux. Les décisions de récolte sont alors à adapter à chaque situation.
Les maïs desséchés pauvres en grains doivent être récoltés rapidement : l’ensemble des plantes ne peut que continuer à se dessécher. Les maïs en retard risquent de ne jamais atteindre le stade favorable : il faudra ensiler avant le risque d’éventuelle gelée.
Un rythme bien géré
Le rythme du chantier d’ensilage est primordial : toute interruption au moment de la mise en silo favorise en effet le développement d’organismes nuisibles. Le principe du procédé repose sur un stockage étanche et en anaérobiose. Une fois le silo tassé et refermé, l’acidification doit être rapide et suffisante (pH < 4), ce qui limite les risques de post-fermentation. Le tassement régulier permet de chasser un maximum d’air pour provoquer la fermentation. La fermeture hermétique bloque les échanges avec l’air atmosphérique : il faut garder à l’esprit que les levures et les moisissures ne se développent qu’en présence d’oxygène. Compte tenu du caractère atypique des maïs cette année, des analyses de valeurs alimentaires et de matière sèche seront indispensables pour calculer des rations économiques et techniquement correctes. Les échantillons doivent être mis au congélateur le jour de l’ensilage s’ils ne sont pas expédiés au laboratoire rapidement.
Alexandre Coronel