Filière viande / Un diagnostic bien-être animal a été intégré aux démarches de qualification Label rouge des élevages producteurs de viande. Sur le terrain, les techniciens utilisent l’outil BoviWell, qui permet de vérifier que les animaux jouissent de leurs cinq libertés fondamentales.

Pendant 20 ans, la Charte des bonnes pratiques d’élevage a servi de socle minimal aux démarches qualité, tant pour les filières laitières que la filière viande. « Aujourd’hui, au vu de l’évolution de la réglementation, elle ne suffit plus, notamment dans le cadre des Etats Généraux de l’Alimentation où la demande sociétale concernant le bien-être animal a clairement été affichée. », explique Caroline Mousseron, chargée de mission à Interbev Bourgogne Franche-Comté. « Il y a une demande de la grande distribution, sous la pression d’ONG qui militent pour la cause animale, pour intégrer la question du bien-être animal comme facteur de différenciation, dans une logique de montée en gamme », précise Philippe Auger, éleveur en Haute-Saône et président d’Elvea France. Ces constatations ont amené la filière viande bovine à ne plus poursuivre le dispositif Charte pour basculer sur la stratégie Label Rouge. 
Dans le cadre de la rénovation du cahier des charges du Label Rouge, l’INAO a donc accepté d’intégrer un diagnostic bien-être animal qui apporte une réponse concrète aux attentes des consommateurs. « C’est l’outil de diagnostic BoviWell, développé par seize organisations agricoles et Moy Park Beef Orléans (principal fournisseur de steaks hachés de McDonald’s France) il y a cinq ans, qui a été retenu », poursuit Philippe Auger. L’intérêt de cette collaboration, qui a mobilisé des experts des instituts techniques et de recherche, des techniciens de coopératives et des éleveurs volontaires, c’est d’être bien adapté à la réalité professionnelle du monde de l’élevage allaitant, avec la prise en compte des spécificités des différents systèmes. L’outil permet d’évaluer le bien-être des vaches laitières comme celui des jeunes bovins allaitants, que l’on peut retrouver sur le territoire.

Un outil adapté aux réalités du terrain
Concrètement, dès aujourd’hui, les éleveurs allaitants, dont la date de validité de la Charte s’arrête en cette année 2020 et qui ont une contractualisation Label Rouge sur base des nouvelles dispositions avec juste rémunération, devront demander la mise en place d’un diagnostic Boviwell auprès de leur technicien d’OP. Ce diagnostic devra être renouvelé tous les trois ans.
Le diagnostic se déroule en deux phases. La première au bureau avec l’éleveur, pour présenter l’outil et faire le lien avec la charte des bonnes pratiques d’élevage. Il est en effet important que les pratiques déjà en place soient prises en compte. La deuxième sur le terrain, il faut compter 30 minutes à une heure pour observer et évaluer les animaux dans leur environnement. « Cette méthode est innovante, dans le sens où elle permet d’avoir une vue d’ensemble sur la relation entre l’éleveur et ses animaux, avec par exemple un test comportement où on observe la réaction des bêtes au cornadis à l’approche du technicien chargé du diagnostic (une personne étrangère à l’élevage), explique Sophie Calloch, technicienne Elvea, formée au diagnostic Boviwell. On va compter le nombre de bêtes qui se reculent pour calculer un pourcentage, qui va être pris en compte dans le score final de l’exploitation. Une autre spécificité de cet outil, c’est que chaque catégorie d’animaux, veaux, élèves, vaches… va être analysée de manière séparée. On regarde aussi de nombreux critères, en lien avec l’alimentation, l’abreuvement, le logement, le bien-être (brosses, brumisateurs…) mais aussi les pratiques de l’éleveur (vêlage, écornage…). »
Le diagnostic permet d’évaluer chaque exploitation au regard de cinq points fondamentaux appelés « libertés fondamentales » des animaux : ne pas souffrir de faim ni de soif, ne pas souffrir d’inconfort, ne pas souffrir de douleurs, blessures ou maladies, ne pas éprouver de peur ou de détresse, et enfin pouvoir exprimer les comportements naturels propres à l’espèce. Un score est établi par « liberté ». Le score s’étend sur 4 niveaux : non classé, progression, supérieur et excellent. Une fois les résultats déterminés, des points d’amélioration pourront être proposés pour améliorer le score de l’exploitation.

Retour de la valeur ajoutée
Cette démarche permet donc de disposer de mesures objectives, robustes et facilement comparables entre les exploitations. L’objectif est de mettre en valeur la qualité du travail des éleveurs pour pouvoir communiquer sur ce sujet auprès des consommateurs. « Il y a une catégorie de consommateurs particulièrement sensible aux critères éthiques dans ses achats : ce sont les jeunes actifs, en particulier à partir du moment où ils ont des enfants », détaille Philippe Auger. « C’est important pour la filière de répondre à ces attentes légitimes du consommateur sur nos conditions de production, mais il faut aussi intégrer le fait que cette démarche à un coût. Celui du temps des techniciens pour effectuer les diagnostics, mais aussi les investissements éventuels des éleveurs pour améliorer le bien-être de leur cheptel : plus d’abreuvoirs à disposition, des passages plus sécurisés, un paillage plus généreux… Il faut donc que la grande distribution, qui est demandeuse, joue le jeu du “gagnant-gagnant” et rémunère justement ces efforts de la filière, sinon ça ne pourra pas fonctionner ! »

AC

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.