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Dégâts de sanglier / 700 000 sangliers ont été prélevés en 2017, soit 20 fois plus qu’au début des années 1970. La situation est particulièrement problématique pour l’activité agricole, puisque le sanglier est le gibier qui provoque le plus de dégâts sur les exploitations. Malgré cela, la Fédération nationale des chasseurs (FNC) a proposé le 24 juillet dernier de retirer le sanglier de la liste des espèces susceptibles d’occasionner des dégâts et d’allonger la période de chasse d’un mois. Les seules indemnisations versées par les fédérations départementales des chasseurs aux agriculteurs victimes de dommages agricoles déclarés s’élèvent annuellement à plus de 30 M€. Cette proposition de la FNC a provoqué la colère des agriculteurs qui se sont mobilisés cet été, avec la FNSEA, pour mettre en avant l’importance des dégâts provoqués par les sangliers et l’impact sur leur activité. 

Après votre mobilisation vis-à-vis des pouvoirs publics, pensez-vous avoir été entendus ?
Thierry Chalmin : La mobilisation syndicale de la FNSEA aura permis de faire prendre conscience aux deux ministres concernés, le ministre de l’Agriculture Stéphane Travert et le secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Transition écologique, Sébastien Lecornu, de la difficulté de notre situation face aux dégâts de sanglier. Les champs de maïs, blé, colza, les vignobles sont dévastés, les prairies sont retournées… Et c’est plus pernicieux que cela, à force, l’usure est psychologique chez les agriculteurs. Rien n’est pire que de trembler le matin en se demandant ce que les sangliers ont ravagé pendant la nuit sur son exploitation. Les agriculteurs n’en peuvent plus de devoir calculer où ils doivent semer leur maïs, de prévenir la société de chasse pour qu’elle protège le champ quand le maïs est très appétent pour les sangliers, de faire des déclarations de dégâts auprès de la fédération départementale de chasse sans se tromper… Notre boulot d’agriculteur n’est pas de se protéger de la faune sauvage !

Que vous répondent les chasseurs ?
T. C. : En face de nous, la Fédération nationale des chasseurs (FNC) nous dit que l’on exagère car seulement 15 % des communes françaises supportent 80 % des dégâts, mais les 33 millions d’euros de dégâts imputés au sanglier se répartissent partout sur le territoire. Les chasseurs nous assurent qu’ils s’occupent de tout… il y a trente ans, on avait 100 000 prélèvements de sangliers par an. L’année dernière, c’était plus de 700 000. A ce rythme-là, on en sera à un million de sangliers prélevés dans trois ans. Ce n’est pas possible de continuer comme ça ! L’agriculture constitue une source de biodiversité et la terre, notre principal outil de production, est mise à disposition des chasseurs pour la pratique de leur passion et de leur sport favori. Il faut revenir à des relations apaisées et constructives entre les principaux acteurs du monde rural. Il en va de la vitalité de nos territoires ruraux.

Que proposez-vous de votre côté ?
T. C. : Nous voulons donner un coup d’arrêt à cette situation, or les outils proposés aujourd’hui à travers la réforme de la chasse ne sont pas de nature à réduire les populations comme nous le souhaitons. Nous demandons la mise en œuvre de tous les moyens possibles de régulation de l’espèce, parallèlement à la régulation par les chasseurs. C’est la raison pour laquelle la FNSEA s’est fermement opposée à la proposition portée par la FNC au Conseil national de la chasse et de la faune sauvage (CNCFS) du 24 juillet dernier d’allonger la période de chasse du sanglier et de le retirer en parallèle de la liste des animaux susceptibles d’occasionner des dégâts. Le sanglier est l’espèce qui cause le plus de dégâts à l’activité agricole ! On ne cèdera pas là-dessus ! Nous proposons d’abandonner les plans de chasse et d’autoriser les tirs libres pendant trois ou quatre saisons, puis de faire les comptes à la fin. Il faut également arrêter de donner des consignes de tir, notamment pour protéger les laies. Dans certains départements, la pression de la chasse ne suffira pas à réduire les populations. Il faut accepter de confier une partie de la régulation aux préfets, et maintenir le droit de destruction pour les agriculteurs. D’autant plus qu’à l’heure où la peste porcine africaine sévit dans plusieurs pays de l’Union européenne, la régulation des populations de sangliers est indispensable pour prévenir le risque d’introduction et de diffusion de maladies animales.

Faut-il également revoir la procédure d’indemnisation ?
T.C. : De nombreux départements font le constat de conséquences négatives de la réforme d’indemnisation découlant de la loi n° 2012-325 du 7 mars 2012 et du décret n°2013-1221 du 23 décembre 2013. Nos fédérations départementales notent une baisse du nombre de demandes d’indemnisation sans corrélation avec une diminution des dégâts constatés ou ressentis. Ce phénomène serait la conséquence d’une revalorisation des seuils de déclenchement, dont l’objectif initial était de ne plus indemniser les petits dossiers au profit des dégâts les plus significatifs, et de la non déclaration de dégâts de la part d’agriculteurs qui craignent de ne pas atteindre les seuils de déclenchement et qui risqueraient, de ce fait, une facturation des frais d’estimation. En outre, depuis la mise en place de la nouvelle procédure d’indemnisation et malgré une première communication commune avec la FNC, certains messages diffusés par des représentants départementaux et nationaux des chasseurs se sont avérés erronés voire contraires à l’esprit des discussions que nous avions eues à l’occasion de la préparation des textes. Malgré les imperfections, nous réaffirmons notre attachement au mécanisme actuel qui repose sur un principe fondamental inscrit dans le code de l’environnement : les fédérations des chasseurs payent les indemnisations de dégâts car elles sont gestionnaires des populations, et donc responsables d’une éventuelle mauvaise gestion. Notre demande principale vise aujourd’hui à activer la clause de revoyure que nous avions inscrite à l’issue des négociations avec les chasseurs et qui avaient abouti à l’actuelle législation. Il est urgent de réformer et simplifier la procédure d’indemnisation. Depuis le protocole d’accord signé avec la FNC en 2012, le contexte a évolué. La population est grandissante et, comme les prélèvements, les modes d’agriculture changent. Il est donc temps de rediscuter de l’indemnisation afin que le juste prix soit réglé aux agriculteurs qui subissent des dégâts.

Pensez-vous que vos demandes vont aboutir ?
T. C. : La mobilisation de la FNSEA a permis la mise en place du Comité national de lutte contre la faune sauvage (ndlr : dont la première réunion s’est tenue le 6 septembre) et l’engagement verbal des deux ministres de tout mettre en œuvre pour réduire de 50 % en trois ans les dégâts liés au sanglier. On espère sincèrement que ce qui s’est passé cet été va déboucher sur quelque chose de plus positif pour nous. La FNSEA participera activement à ce comité national pour obtenir les réformes nécessaires.

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