Dambenoit-les-Colombe / Flora Loridat s’installe à Dambenoît-lès-Colombe en production porcine plein air bio. Son projet, récemment récompensé par une bourse de la Fondation de France, s’articule autour de l’autonomie alimentaire et de l’intégration dans un circuit local.
Après une première partie de sa vie professionnelle dans l’enseignement Flora Loridat vient de se lancer dans une nouvelle aventure : l’élevage de porcs plein air bio. La jeune femme, ingénieur en agriculture, a en effet abandonné son métier de responsable de formation en CFA pour se tourner vers l’élevage porcin. Après un an de formation technique complémentaire dans un élevage mosellan, elle a lancé sa nouvelle activité avec quelques porcs noirs de type Gascon qui pâturent provisoirement à Franchevelle.
Miser sur la qualité
A terme, l’élevage sera implanté sur la commune de Dambenoît-lès-Colombe. « Le choix de la race, explique Flora Loridat, s’est fait en cohérence avec mon objectif d’une production axée sur la qualité. C’est une souche moyennement prolifique (7 porcelets par portée en moyenne), mais réputée pour sa croissance lente qui va donner une viande au gras bien persillée. » Ces cochons, abattus entre 12 et 18 mois, produisent une viande « qui se rapproche assez de la viande rouge » pour la couleur et présente donc ce double avantage : pour la consommation fraîche, moins de jus et plus de goût ; pour la charcuterie, des arômes plus facilement révélés.
Un point clef pour le positionnement commercial du futur élevage. Les consommateurs ciblés sont en effet prêts à acquérir un produit un peu plus haut de gamme, à condition d’être assurés d’une bonne qualité organoleptique et du respect de l’environnement. Pour la qualité des produits, Flora souhaite « travailler des recettes originales qui marquent le produit ». Pour le moment en l’absence de labo, c’est un prestataire qui lui assurera la transformation. La vente se fera en direct, en caissettes de 5 kg, et à terme pourquoi pas en magasin de producteurs.
Axer sur le pâturage et l’autonomie
Pour l’aspect environnement, Flora Loridat a décidé de miser sur l’élevage plein air : « Un cochon peut pâturer jusqu’à 30 % de sa ration quand l’herbe est disponible », explique-t-elle. Comme pour un troupeau bovin, il s’agit donc de gérer l’herbe quand la pousse est assurée. Dans un premier temps, 5 ha pourront assurer le pâturage de 50 cochons. L’hiver, ce sera aire paillée. D’abord pour des évidences agronomiques (ne pas déstructurer les pâtures), ensuite pour des contraintes d’élevage (plus de boue, c’est autant d’énergie que les animaux devront dépenser en perte), et enfin pour le confort de travail : « Un élevage pérenne, c’est d’abord du confort animal, mais le confort animal passe par le confort de l’éleveur », explique-t-elle.
Pour assurer le reste de l’alimentation, Flora Loridat compte sur la production céréalière de l’exploitation de polyculture-élevage qu’elle reprend : « Une truie et sa suite, c’est 12 t d’aliment par an. Avec les rendements bio, cela représente 4 ha de céréales environ, et compter le double pour tenir compte de la rotation longue. » Avec un objectif de 8 truies pour commencer, les 95 ha de terres cultivables devraient suffire à couvrir les besoins. Un investissement est prévu pour l’achat d’un moulin pour la fabrication à la ferme.
Local et intégré
Les cochons seront abattus à l’abattoir de la Motte à Vesoul. C’est toujours le « lien local » qui compte quand on vend en direct ; et dans le projet de Flora, perce également une préoccupation paysagère qui a d’ailleurs accroché l’attention du jury « Déclic Jeunes » (voir par ailleurs). « Produire un aliment qui soit bon, c’est l’objectif principal. Mais je souhaite aussi participer à la vie du territoire, explique-t-elle. Le paysage, c’est important. Je suis originaire d’ici, j’aime ce bocage où j’ai grandi, et je souhaite en conserver la structure, l’améliorer. » Elle a donc l’intention de replanter des arbres fruitiers pour développer un ombrage bienfaisant pour les animaux, et, bienfait collatéral, les pommes seront valorisées par les cochons, omnivores s’il en est.
Travailler la communication positive
Quand on parle élevage de porc, les gens « ont en tête des images d’élevage “industriel”, et pensent d’abord nuisances olfactives et pollution », constate Flora Loridat. À tel point que certains habitants de Citers, où l’agricultrice a trouvé une parcelle d’estive, ont entamé une pétition qui, réseaux sociaux aidant, a été signée par 150 personnes à ce jour (80 % déclarant ne pas résider à Citers). Avec parfois des confusions étonnantes prouvant une grande ignorance des réalités agricoles. Pour répondre à cette levée de boucliers, la jeune agricultrice a choisi d’organiser une réunion publique d’information à la salle polyvalente, le 12 octobre dernier. Une cinquantaine de personnes sont venues, dont une quarantaine du village. Flora a donc pu présenter son projet, et répondre aux questions des participants. Elle s’était fait accompagner de plusieurs responsables professionnels, dont Baptiste Bernard co-président d’Interbio Franche-Comté et également éleveur de porcs plein-air près de Gray et Lise Ducret conseillère technique à interbio. Etaient également venus soutenir la jeune femme le président des JA Gérald Pichot, Mickaël Grévillot, conseiller bio à la chambre d’agriculture, et même Margueritte Pierrel, de l’Association Luronne de Protection et d’Étude de la Nature. « Il faut éviter d’entrer en conflit, et travailler la communication », estime Flora Loridat. Sur le volet bien-être animal et bien-être de l’éleveur, elle n’hésite d’ailleurs pas à citer les travaux de Jocelyne Porcher, sociologie à l’Inra, qui a travaillé ces notions et celle de « bonne vie ». Technique à l’intérieur, communication à l’extérieur… La recette semble bonne.
LD