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Séparateur de phase / Voilà un an que Germain Bilat « paille » ses logettes avec la phase solide du lisier, récupérée grâce à un séparateur de phase. Une technique loin d’être intuitive et qui pourtant fonctionne dans cette exploitation.

C’est une technique assez contre-intuitive : « Faire coucher mes vaches dans la merde ? lance franchement Germain Bilat. Quand on m’a parlé de ça je n’y ai pas cru. » L’idée fait pourtant son chemin, au moment où le jeune éleveur repense la configuration de sa stabulation. Il fallait de toute façon modifier le bâtiment existant (en aire paillée), créer des logettes, installer un racleur. C’est à ce moment que la décision est prise d’utiliser un séparateur de phase pour gérer le lisier. « Sans penser au couchage », dans un premier temps. Mais au moment d’investir dans les matelas, le choix a été fait de se servir du résidu sec de lisier (obtenu par le séparateur de phase) pour « pailler » les logettes (le terme est désormais impropre).

Une demi-heure par jour
L’installation démarre le 15 novembre 2015. Le système est relativement simple : le racleur pousse le lisier vers une pré-fosse de 26 m de long (capacité de 60 m3) en bout de bâtiment. La pré-fosse est divisée en son milieu par un mur plus court que la longueur de la fosse, et un mélangeur fait circuler le lisier dans les deux couloirs ainsi formés. La mise en route se fait automatiquement. De là, une pompe envoie le lisier vers le séparateur de phase, qui tourne tous les jours pendant une demi-heure : c’est suffisant pour traiter le volume de lisier généré en 24h (environ 4 m3/jour pour 70 vaches laitières). « Selon le réglage effectué, explique en effet Franck Pegeot qui a effectué l’installation pour la société HTM, le séparateur peut traiter de 4 à 20 t de lisier par heure. » Même au réglage le plus lent, les 4 t de lisier produits par jour sont traités en 1h. La phase solide tombe sur une aire de stockage. Le taux de siccité recherché (taux de MS) est aux alentours de 25 %. À ce taux, on obtient un « rendement » d’environ 30 %, c’est-à-dire que de 100 t de lisier brut à 10 % de MS, on obtiendra 30 t de phase solide à 25 % de MS, et 70 t de phase liquide à 4 % de MS. La phase liquide est quant à elle soit dirigée vers la fosse de stockage final, soit réinjectée dans la pré-fosse pour liquéfier le mélange.

Économie de temps de travail
La phase solide peut être compostée. Mais pour « pailler » les logettes, Germain Bilat préfère une autre méthode : « Il ne faut pas laisser fermenter, sinon cela revient à pailler avec du fumier ! » Sans compter l’élévation rapide de la température. Au godet, l’éleveur prélève donc une partie de la phase solide du jour, pour l’amener dans l’allée de paillage. « Environ 6 godets, 2 fois par semaine. En été, moins souvent bien entendu, puisque les vaches pâturent. » Ici, la phase solide qui a la texture de la sciure et qui est sans odeur est tassée légèrement sous les roues. Et tous les jours, une grosse pelletée est jetée dans les logettes. « Je passe racler l’arrière des logettes, qui retournera dans le circuit, et je repousse le plus sec vers le fond. » Bilan : moins de temps de travail, comparé au paillage, et moins de pénibilité : manutention des bottes, poussière, manutention du fumier…

La rotation améliorée
Autre avantage évident : l’économie en paille. « En aire paillée, nous utilisions environ 28 bottes par semaine », soit plus de 20 t de paille par mois. En logettes paillées, la consommation était déjà tombée à 8 bottes par semaine, soit encore plus de 6 t par mois, environ 30 t pour l’hiver. Avec l’économie réalisée, en comptant un rendement de paille de 3 t/ha, ce sont 10 ha de céréales qui peuvent être économisés. « J’ai modifié la rotation, confirme Germain Bilat. J’ai supprimé 10 ha de céréales pour mettre 8 ha de luzerne, et un peu de colza. » Une démarche d’économie de protéine cohérente.

Épandage facilité
L’épandage des effluents est également modifié avec l’utilisation d’un séparateur de phase. Indépendamment d’ailleurs de l’utilisation de la phase solide pour le paillage. D’abord, la réduction de la phase liquide d’environ un tiers n’est pas négligeable. Avec 70 VL, on va passer de 500 m3 de lisier à stocker, à 350 m3 environ. Ensuite, la phase liquide obtenue est plus fluide : pas de morceaux de paille pour boucher le pendillard, un taux de MS réduit de moitié par rapport au lisier brut (2 à 6 % de MS selon le réglage du séparateur). Qui dit moins de lisier à épandre, dit moins de trajet à effectuer. Certes, il faut également épandre la fraction solide, mais celle-ci est assimilable à un compost au bout de quelques semaines. Sans odeur, elle peut être épandue à proximité des maisons d’habitation et des cours d’eau.

Dépense énergétique réduite
L’installation à un coût. Selon les modèles, l’ordre de grandeur est d’environ 25 k€. Avec les logettes, les racleurs et le séparateur, la place a coûté environ 1 100 €. On peut estimer le coût du séparateur à 300 €/place, mais les tapis seuls auraient coûté environ 200 €/place. Le surcoût est donc d’une centaine d’euros par place, si on impute le prix au logement seulement. Ajouter à cela le coût de fonctionnement (environ 11 kW de puissance installée entre le malaxeur et le séparateur, pour moins d’une heure de fonctionnement par jour, soit moins de 10 kWh/jour). Et soustraire bien entendu les économies en paille, en temps de travail, en temps d’épandage. À chacun de faire son calcul.

LD

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