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Elevage / Vesoul, Gray, Luxeuil, Lure, Héricourt, Saint-Loup-sur-Semouse, Gy, Villersexel, Jussey… La mobilisation a été forte lundi soir devant les principales grandes surfaces du département.


Dans la soirée du lundi 22 juin, plus de 200 éleveurs ont bloqué les entrées d’une quarantaine de grandes surfaces du département, à grand renfort de bennes de fumier. Un cri d’alarme et une action dont Sylvain Crucerey, président de la FDSEA 70, nous explique la portée.

« Nous cumulons les handicaps de 3 filières en crise »

Malgré les avancées obtenues la semaine dernière à l’issue du blocage des abattoirs, vous avez choisi de vous en prendre aux grandes surfaces. Quel intérêt ?
Sylvain Crucerey : C’est vrai que l’action syndicale de la semaine dernière a permis de provoquer cette réunion au ministère et d’obtenir des avancées sur les prix de la viande. Un accord qui intervient à la suite de négociations longues et difficiles. L’idée est maintenant de veiller à ce que cet accord soit respecté, en maintenant la pression sur les GMS, et indirectement sur les transformateurs. Notre objectif est en urgence de rendre la production de viande moins déficitaire… Selon les animaux, un éleveur perd en ce moment entre 250 et 350 € à chaque abattage. On ne peut pas continuer à vendre à perte !

Et les autres filières, au-delà de la viande ?
SC : Il faut rappeler que notre département a une orientation forte en polyculture-élevage, dont une bonne partie en lait standard. Nous cumulons le handicap des 3 filières (céréales, viande et lait) qui subissent une crise particulièrement forte. Une des répercussions directes de ces manifestations va directement impacter la filière laitière : l’enseigne système U annonce publiquement que, lors de ses négociations commerciales de février, elle a pris comme base un prix du lait à hauteur de 340 €. Or, à ce jour, le litre de lait est toujours acheté à la production environ 300 € ! Si Système U s’étonne et s’interroge sur ce différentiel, je condamne le hold-up de certains transformateurs laitiers qui préfèrent se dédouaner en accusant leurs clients (les GMS) de tous les maux.

Les industriels et la GMS ont justement rappelé que les difficultés de l’élevage sont structurelles, et ont appelé à une vaste remise en question. Ne craignez-vous pas de pénaliser la filière en ciblant son aval ?
SC : En premier lieu nous avons opté pour une opération très rapide. Il ne s’agit pas d’un blocage long mais d’une action courte pour permettre une remise en question. Pour être vraiment efficace, il faudrait bloquer, sur un mot d’ordre national, toutes les plates-formes d’approvisionnement des réseaux de distributeurs. On arriverait alors à une vraie pression sur l’aval de la filière. Mais il faut noter en second lieu que sur notre département nous n’avons aucune plate-forme de distribution. On met donc la pression, à notre niveau, avec les moyens dont nous disposons sur les interlocuteurs que nous avons.

La GMS n’est d’ailleurs pas votre interlocuteur direct. Quelles marges de manœuvre avez-vous dans les éventuelles négociations à venir ?
SC : Nous ne sommes pas directement en prise avec les GMS, c’est vrai. Mais leur situation de quasi monopole sur le marché les positionne au centre des débats. Maintenant il nous reste une corde à jouer, dans notre département, en dernier recours : c’est celle des élus. Nous devrions sans doute rencontrer les hommes politiques de notre département, pour les alarmer sur la situation catastrophique de l’agriculture haut-saônoise. Nous allons probablement les interpeller très prochainement, vu notamment l’approche des échéances électorales de la fin d’année.

Reste l’image pas toujours positive que ces manifestations musclées laissent auprès du grand-public, et parfois de certains agriculteurs ?
SC : L’image n’est pas forcément belle. Mais un mouvement de cette ampleur, ce n’est pas une mise en scène pour amuser la galerie. C’est avant tout une action demandée par nos adhérents, un nécessaire exutoire de leur ras-le-bol après des mois de crise continue. Il vaut mieux de toute façon coordonner nos efforts dans une lutte unie, plutôt que de laisser faire des groupuscules qui pourraient s’adonner à des actions plus violentes, sans interlocuteurs, sans direction. Si les relations étaient équilibrées il suffirait de s’asseoir autour d’une table et de discuter, mais la filière n’est pas organisée ainsi : la viande passe par le goulot d’étranglement – qui porte bien son nom – de la grande distribution.

Propos recueillis par LD

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